Fontenay-sous-Bois a toujours été une terre d’accueil pour de nombreux exilés et réfugiés, notamment durant les années 70 et 80. Aujourd’hui encore, elle est le passage obligé pour les demandeurs d’asile qui doivent se rendre à l’OFPRA. Son histoire et son présent sont donc fortement marqués par les migrations.

Aujourd’hui, ce sont les Passeurs de cultures Houlaïmatu et Alicia qui nous ont donné rendez-vous à Fontenay-sous-Bois pour une visite hors du commun proposée par l’association Bastina. Cette balade urbaine dans les rues de la ville nous amènera à découvrir des « Histoires d’exil ». Chaque balade est unique car elle se fait selon la disponibilité des différents intervenants rencontrés au gré de la visite ainsi que des échanges avec les participants. Elle se présente comme un assemblage de témoignages agrémenté de découvertes de lieux évoquant à la fois l’exil et le vécu des guides.

De l’Argentine à Fontenay-sous-Bois

Alicia a grandi en Argentine et est arrivée en France dans les années 1970. Enrôlée dans un mouvement de résistance suite à l’assassinat de son premier mari par les militaires qui dirigeaient alors d’une main de fer le pays, elle devient clandestine et décide de fuir la dictature « devenue trop féroce ». Son parcours jusqu’au Brésil est semé d’embûches, un itinéraire « entre la vie et la mort ». Elle doit notamment « traverser des rivières » et ne pas se faire repérer par les militaires.

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Passeurs de culture à Fontenay-sous-Bois © CDT

Elle demande l’asile politique à son arrivée à Rio de Janeiro où elle transite pendant six mois jusqu’à rejoindre l’Hexagone. L’association France, Terre d’asile l’accueille à son arrivée à l’aéroport Paris-Orly avant qu’elle ne s’installe à Fontenay-sous-Bois, une ville qu’elle n’a jamais quittée depuis. Le parcours de tout réfugié est compliqué et il lui faut, en quelques mois seulement, accomplir de nombreux prérequis avant l’obtention de la citoyenneté française : faire une demande de carte de séjour ainsi qu’une carte d’immatriculation, trouver un logement ainsi qu’un travail et scolariser rapidement ses enfants alors âgés de 3, 8 et 10 ans. De sa vie à Fontenay-sous-Bois, elle retient la solidarité des habitants dont certains l’invitaient régulièrement à manger chez elle. Elle a d’ailleurs noué une amitié forte avec certains d’entre eux qu’elle côtoie régulièrement.

Son récit, intense et émouvant, est suivi par un temps d’échanges avec les participants de cette balade. L’occasion notamment pour moi de lui demander pourquoi elle n’a pas souhaité rentrer en Argentine, maintenant que le pays est stable. « Mes enfants étaient bien ici, ils étaient très bien intégrés et moi aussi ».

La Fonderie, lieu d’exil artistique ?

Avant d’entamer la seconde partie de notre promenade urbaine, nous nous dirigeons vers la Fonderie. Cette ancienne fonderie d’aluminium de 1700m² a été réinvestie en 2006 par un collectif de 40 artistes de tous les horizons pour bâtir ce qui est aujourd’hui un pôle de création artistique hors-normes.

Graphistes, peintres, sculpteurs, graveurs, ébénistes, etc. : de nombreux corps de métier sont représentés. Leurs travaux sont variés. L’art et la création ont envahi l’espace. Nous sommes invités à pousser les portes d’ateliers et à rencontrer les artistes issus des quatre coins du monde. Bien que nous interrompions certains dans le cours de leurs créations, ils nous accueillent chaleureusement et se prêtent au jeu des questions des visiteurs d’un jour sur leurs œuvres.

La Fonderie à Fontenay-sous-Bois ©CDT94/A. Bertrand

L’exil Guinéen de Houlaïmatu

Nous reprenons le cours de notre visite avec Houlaïmatu dont l’histoire d’exil est plus récente que celle d’Alicia. Elle et son mari ont fui la Guinée-Conakry il y a deux ans avant leur arrivée en Val-de-Marne, à Choisy-le-Roi, où ils furent d’abord hébergés. Mère d’une petite fille qu’elle tiendra dans ses bras durant toute cette visite, elle nous raconte comment elle a dû quitter son travail de journaliste à la télévision pour fuir la guerre civile.

Loin de ses proches, elle nous assure pourtant avoir trouvé « une autre famille ici ». Être Passeur de cultures l’aide d’ailleurs beaucoup grâce aux rencontres et aux relations sociales nouées avec ce projet qui lui permettent de partager son histoire et ses émotions.

La promenade se poursuit et nous nous arrêtons dans le parc de la mairie à côté de la statue Héloïse ou… la Fille des Trois-Rivières de Maurice Cardon forte de sens car c’est un mémorial de l’abolition des traites et des esclavages. Houlaïmatu fait rapidement le lien entre la balade et l’exil forcé pour de nombreux réfugiés. De nombreuses filles doivent se prostituer pour survivre financièrement, certains d’entre elles arrivent ensuite à fuir et à rejoindre une terre d’accueil. Faute de moyens de contraception, beaucoup sont celles qui découvrent leur grossesse après leur arrivée. Plusieurs passants curieux se joignent au groupe et écoutent attentivement ce récit poignant qui ne laisse personne indifférent.

Balade « Histoires d’exil » à Fontenay-sous-Bois ©CDT94/A. Bertrand

Dernier arrêt aujourd’hui : le Centre pastoral de Fontenay-sous-Bois. Ici nous sont détaillées les différentes étapes que doivent suivre chaque demandeur d’asile à leur arrivée sur le territoire français. L’OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides), l’organisme qui suit les dossiers, est d’ailleurs basé à Fontenay-sous-Bois. Les démarches sont complexes et doivent être réalisées dans des délais très courts. Pour aider les demandeurs d’asile venus des quatre coins de la France, un noyau dur d’une quarantaine de familles s’est organisé dans la commune val-de-marnaise. Elles offrent l’hébergement pour quelques jours et aident également en amenant les demandeurs à leurs rendez-vous administratifs.

C’est dans ce Centre pastoral qui accompagne Houlaïmatu, entre autres, dans ses démarches, que s’achève cette visite « Histoires d’exil ». Comme vous l’aurez compris, chaque arrêt au cours de cette balade devant un bâtiment ou un monument a été l’occasion pour l’une de nos accompagnatrices de nous conter une partie de son vécu ou de l’histoire de la ville. Les visiteurs ont pu porter ainsi un autre regard sur la ville et ses habitants.

D’autres balades des Passeurs de cultures sont proposées à Ivry-sur-Seine et Choisy-le-Roi. D’autres récits de vie vous attendent en Val-de-Marne !

À l’occasion de la Journée internationale des migrants, le 18 décembre, découvrez la vidéo réalisée par le Conseil départemental du Val-de-Marne qui s’inscrit au cœur de la Campagne « Migrations : partageons nos richesses » de déconstruction des représentations sur les migrations.

Portée par le Conseil départemental du Val-de-Marne, elle a pour objectif de sensibiliser le grand public sur la base de supports et/ou démarches résonnant avec les réalités quotidiennes des habitants du Val-de-Marne. Dans ce cadre, le film « L’immigration, c’est notre histoire » a été co-construit en partenariat avec le FORIM (Forum des Organisations de Solidarité Internationale issues des Migrations) et l’association Baština Voyages Si loin Si proche.

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